Les numéros un de la CFDT, FO, CFE-CGC, Unsa, Solidaires et FSU ont apporté leur soutien à la secrétaire générale de la CGT Sophie Binet, mise en examen pour avoir dénoncé les chefs d’entreprise qui délocalisent. Depuis 2023, la vague de fond de la répression frappe la centrale syndicale.

Avec la mise en examen de sa secrétaire générale, la CGT dénonce une « énième procédure bâillon » Depuis 2023, plus de 1 000 cégétistes ont été inquiétés de procédures judiciaires ou disciplinaires.
© Fête de l’Huma / lahcène Abib pour la Fête de l’Humanité
Les poursuites à l’encontre de Sophie Binet indignent ses camarades syndicaux. Le 5 décembre, trois jours après la mise en examen de la secrétaire générale de la CGT, les responsables de six centrales ont signé une déclaration refusant « que le débat social se tranche dans les prétoires ».
Fin janvier, invitée sur RTL à réagir à l’affirmation de Bernard Arnault selon laquelle le projet de surtaxe du gouvernement « poussait à la délocalisation », la cégétiste avait qualifié les grands patrons de « rats qui quittent le navire » dont « le seul objectif est l’appât du gain ». Le mouvement patronal Ethic de Sophie de Menthon avait ensuite déposé plainte.
« Nous, secrétaires généraux, présidents et responsables d’organisations syndicales, apprenons que Sophie Binet est inquiétée par la justice pour avoir usé d’un dicton imagé et bien ancré dans la sagesse populaire face à l’attitude de certains dirigeants économiques », écrivent Marylise Léon (CFDT), Frédéric Souillot (FO), François Hommeril (CFE-CGC), Laurent Escure (Unsa), Murielle Guilbert et Julie Ferrua (Solidaires), ainsi que Caroline Chevé (FSU).
Avant de s’interroger : « N’est-il pas violent de menacer de quitter « le vaisseau France » après avoir accumulé des fortunes grâce aux aides publiques, aux infrastructures et au système éducatif de notre pays ? » Selon ces responsables syndicaux, l’expression « “les rats quittent le navire” n’est pas une injure, mais le constat amer d’un comportement irresponsable. Elle illustre une réalité : celle de la fuite des capitaux et des responsabilités face à l’effort collectif. »
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En deux ans, plus de 1 000 cégétistes en proie à la répression
La CGT, qui dénonce une « énième procédure bâillon », est en proie à une véritable répression antisyndicale à tous les niveaux de son organisation. Depuis 2023, plus de 1 000 cégétistes ont été inquiétés de procédures judiciaires ou disciplinaires.
Ainsi, le 7 mai, Corinne Versigny, secrétaire générale de l’union départementale de la Gironde, avait été condamnée après avoir dénoncé, preuve à l’appui, les stratégies managériales et les choix de délocalisation d’un sous-traitant dans l’automobile.
Depuis le mouvement contre la réforme des retraites, cinq procédures judiciaires ont été lancées contre des membres du bureau confédéral de la CGT. Dont Myriam Lebkiri, inquiétée pour avoir collé des affiches, et Sébastien Menesplier, ancien CGT mines-énergie qui a depuis rendu ses mandats syndicaux, entendu par la gendarmerie à la suite d’une coupure de courant durant le conflit social.
« Cette tentative manifeste de judiciariser la critique sociale et de détourner le débat public illustre une nouvelle fois la volonté de certains lobbys patronaux au service des plus riches pour faire taire les voix qui dérangent », tranche, au sujet de Sophie Binet, la CGT. En juin 2024, la cégétiste avait réclamé une loi pour qu’une immunité semblable à celle des parlementaires soit conférée aux délégués syndicaux, ainsi que l’ouverture d’une commission d’enquête sur la répression des syndicats en cours
Naïm Sakhi, journal l’Humanité , le 7 décembre 2025
